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18 juin 2008

American Psycho

Patrick Bateman est un jeun Yuppie des années Trump : riche, sans scrupule, défoncé à la coke, aux amphét et antidépresseurs, performant. Mais quand il n’est pas occupé, il tue, torture, viole de la façon la plus abjecte qu’il soit. Et il ne ressent rien.

Le début peut faire penser à du Beigbeder, c’est trash, c’est cynique, c’est sans langue de bois et sans concession. Mais on finit par déchanter, moi du moins.
Ça devient rapidement difficile à lire.
Ce livre est une abomination manuscrite, un croisement entre Journal d’un obsédé sexuel, Journal d’un psychopathe et Catalogue de luxe d’un minet pété de thunes de Wall Street.
Sans réelle histoire de fond, la succession de dîners et déjeuners prestigieux, succède aux étonnantes parties de sexe torride à plusieurs entrecoupé
(c’est le cas de le dire !) de têtes coupées, seins brûlés et mains arrachées – et parfois même, avalées.
Au milieu de tout cette agglomération de joyeusetés, on suit difficilement le personnage principal cannibale dans ses activités quotidiennes. Mais rien d’autre. Pas de grandes réflexions psychologiques ou sociologiques, pas de prise de conscience ou de basculement total dans la folie, pas de séance de psy où il dirait « hum, ça vient certainement de la petite enfance », pas même une minuscule enquête de police et encore moins un face à face prenant avec un inspecteur bien décidé à trouver l’assassin. Presque rien.
Alors oui, effectivement, on comprend assez vite que la société de consommation, de l’image est derrière tout ça, notamment par les petites interventions de Patrick Bateman qui passent complètement inaperçues :

« - Featherhead ? Comme diable es-tu passé de Leatherface à Featherhead ?
- Allez, remets-toi, Bateman, dit-il, me gratifiant d’une claque dans le dos, puis commençant à me masser la nuque. Qu’es-ce qui se passe ? Tu n’as pas eu ton shiatsu, ce matin ?
- Continue de me tripoter comme ça, dis-je, les paupières serrées, tout mon corps électrisé, tendu, ramassé, prêt à bondir, et c’est un moignon que tu auras au bout du bars.
- Oh, là, du calme, du calme, mon petit pote, fait McDermott, reculant, faussement effrayé. Tous deux se mettent à ricaner comme des imbéciles et échangent une grande claque, sans deviner le moins du monde que je lui tronçonnerais volontiers les mains et, de plus, avec joie »

A mon sens, ce n’est pas suffisant pour une prise de conscience. C’est juste de l’horreur en barre. Et beaucoup s’arrêteront avant même d’avoir compris le pourquoi du comment, si tant est qu’il y en est un.
Je me demande comment un tel livre a pu être adapté par l’industrie du cinéma hollywoodien… ou alors le film est très édulcoré (ce qui ne m’étonnerait pas) ou alors il a du largement choquer l’américaine vierge et puritaine.
"Pour souligner l'essence satirique du propos, Mary et moi avons concentré l'histoire originale, en avons sélectionné les moments cruciaux, en mettant l'accent sur l'humour du comportement des personnages et en choisissant les éléments clés des dialogues brillants et très drôles d'Ellis. "*

Personnellement, je n’ai rien trouvé de drôle dans ce livre. Bien au contraire. Tout y est écœurant. Pas seulement les crimes atroces, mais aussi la facilité avec laquelle cela se fait, l’argent, l’impassibilité des autres personnages devant les révélations de Bateman, le mépris général pour les femmes. On dirait que tout ce ramassis de beau monde est déconnecté de la réalité. Et ce qui dérange est détruit. Là où les autres ferment les yeux et détournent le regard, Bateman regarde droit devant et tue, parce que les clodos dérangent dans son paysage. Vision extrême de notre société effectivement.
Le roman se passe dans les années Reagan alors qu’imaginer si Bateman se retrouvait dans notre société du 21ème siècle. Ce serait un véritable holocauste. (sic)
Seules les 70 dernières pages du bouquin (qui en compte 527) peuvent valoir le coup. Entre deux ou trois crimes horriblement détaillés, ce cher Pat Bateman manque de se faire prendre par la police, angoisse, perd pied et réfléchit. Mais c’est tellement insuffisant pour justifier toutes les atrocités commises au gré des envies du « héros ». Ca finit même…bien !
Bref, je ne conseillerais pas ce livre. L’auteur peut être intéressant mais ce bouquin est plutôt à éviter, surtout après manger…


p.s : je vous ai évité les pires extraits, notamment les sympathiques meurtres de filles qui sont des miracles d’ingéniosité et de cauchemars… Pour vous donner une idée, voici quelques mots, je vous laisse deviner, ce qu’il a pu en faire : acide, câble électrique, tronçonneuse, rat, fromage, vagin…
Si il existait une interdiction comme pour la télé ou le ciné, le livre porterait la mention, « interdit au moins de 18 ans »

*propos de Guinevere Turner, coscénariste et interpréte d'Elizabeth sur allocine.fr

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Commentaires
A
J'adore le passage où Jared Leto se fait assassiner à la hache...
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C
Eh bien moi j'avais trouvé ce livre assez remarquable, passionnant. Alors évidemment ce n'est pas franchement agréable à lire, en particulier les scènes de torture, mais je n'ai pas la même vision que toi.<br /> Je vois plutôt ce livre comme le portrait, poussé à l'extrême, de ce que notre société qui cultive l'apparence et le fric peut produire. Un homme froid et sans âme, qui cherche à tout contrôler et qui quand il se rend compte du vide de son existence, tente de le combler en massacrant ses congénères (le contrôle absolu).<br /> Pour moi ce livre ne parle pas tant de haine que de perte des valeurs et de repères dans une société moderne qui prône le tout, tout de suite.<br /> Quant à la happy end, je n'en suis pas sûre. Je pense que plane l'ombre de la folie, sous laquelle il n'est pas facile de distinguer ce qui s'est réellement passé. Tu n'as pas ressenti ça à la fin ?
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A
Oué, moi aussi je suis bien motivé
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A
Je n'ai jamais vu le film, jamais lu le livre, mais j'avais envie de le lire. Maintenant que tu le déconseilles, j'ai encore plus envie de le lire ^^ <br /> Peut-être qu'il faut lire le livre dans l'esprit des années Reagan, un peu comme Orange Mécanique. <br /> On m'avait dit que ce film était traumatisant, que je ne devais pas le voir, sinon l'avais être choquée, mais au bout de 20 minutes de film je me suis tellement emmerdée que j'ai éteint, peut-être que c'est le même cas pour ce livre, qui a quand eu de bons échos. J'en ai entendu du bien quand même... Je pense le lire, je t'en dirai des nouvelles ^^
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