Elle panique
Bientôt je n’aurais plus de chambre. Je vais emménager avec mon copain et ma chambre dans la maison familiale va disparaître. Oh bien sur, ma mère m’a dit « ce sera toujours chez toi ici »
Mais MA chambre va s’empresser de disparaître.
Ma sœur va la récupérer. Y habiter, enlever la moquette, refaire les murs, virer mes meubles, mes affaires. Pour y mettre les siennes.
C’est con mais ça m’arrache le cœur rien que d’y penser. Ma chambre d’adolescente va définitivement mourir, elle ne sera plus.
Je ne pourrais pas dire « oh ça me fait bizarrement de revenir dans ma chambre de jeune fille »
Je crois que quand j’aurais perdue cette chambre, cette pièce si précieuse finalement, je n’aurais plus aucune envie de revenir dans cette maison, dont je me sens chassée.
Je ne veux pas donner ma chambre. Ça me donne envie de pleurer, de m’accrocher aux murs, de tout arracher, déménager sur le champ pour m’éviter le supplice d’y penser.
Je vais perdre cette pièce alors que la maison n’aura pas bougé. Je préfèrerais déménager, perdre toute la maison plutôt qu’une seule pièce. Tout d’un coup mais pas ce morceau auquel je tiens.
Quand ma chambre aura disparu, il restera plus aucune trace de moi ici, à part les photos. Plus rien.
Il y aura bien une pièce qui s’appellera 'Chambre de Zofia' et dedans des objets qui m’auront appartenu. Mais je n’aurais jamais dormi dans cette chambre. Je n’y aurais pas eu de crises de larmes, de crises de rage, de crises de rire. Je n’y serais jamais entrée en claquant la porte pour me jeter sur le lit. Ou entrée doucement après être sortie en boîte un samedi soir.
Jamais.
Je vais arracher les photos du mur et n’en collerais pas de nouvelles.
Je serais obligée de jeter les rideaux, "ma" nouvelle chambre a une fenêtre si petite qu’ils seront bien trop grands.
Je suis prête à emménager avec un homme mais je ne suis pas prête à perdre ma chambre d’ado.
Cet endroit de mes premiers émois, de mes premiers malheurs.
Cet endroit que je croyais immortel.
Fous-moi la paix ma sale caboche, tu ne me feras pas craquer - Olivia Ruiz, Elle panique