Les trois mois de suspension de permis de Monsieur arrivent à leur terme, il devrait recevoir son permis dans quelques jours (enfin on espère !). C’est l’occasion pour moi de faire le bilan de ces trois mois de conduite intensive et quasi régulière, ce que je n’aurais jamais pensé réussir un jour…
Globalement, tout s’est plutôt bien passé, j’ai traversé la France d’Ouest en Est par l’autoroute et les nationales, je suis allée jusqu'à Digne les Bains par des petites routes, j’ai conduit avec un vélo sur le coffre, sur la neige aussi (à peine 2 cm mais quand même), j’ai conduit dans une grande agglomération, en pleine nuit sur les routes étroites et merdiques dans le Var, de nuit, sous la pluie, dans le brouillard, avec mes lunettes de soleil. Je n’ai quasiment pas conduit seule à part deux fois, et je n’ai pu le faire que parce que c’était le soir. Je ne me sens pas encore capable de conduire en pleine journée, en ville, avec la circulation intensive.
Je n’ai d’ailleurs réussi à m’en sortir que grâce à Monsieur qui s’occupait de gérer le frein à main quand nous étions arrêtés en côte pendant que moi je gérais l’embrayage et l’accélération. Je me rends compte aujourd’hui à quel point le fait de ne pas avoir appris, à l’auto-école, le démarrage en côte avec le frein à main me pose des problèmes. Ça ne m’est pas venu à l’esprit de demander au moniteur de me l’apprendre car sur la voiture de l’auto-école, l’embrayage était très souple et je n’avais aucun mal à trouver le point de patinage, attendre puis démarrer tranquillement, sans l’angoisse de caler ou de reculer dans la voiture garée derrière moi.
Je n’ai pas eu trop peur en conduisant cet automne, au début je prenais de l’homéopathie pour calmer un peu mon stress avant de conduire, j’ai diminué au fur et à mesure pour ne presque plus en prendre aujourd’hui. Mais ce ne fut pas tout rose, il y a eu des cris, des larmes, des bouderies, pleins de gros mots prononcés, une rayure et une grosse frayeur.
Des cris parce que Monsieur n’a pas trop l’habitude de se faire conduire et comme en plus, j’étais assez stressée, ben ça a parfois clashé. J’appréciais le fait qu’il me conseille sur le moment où je devais passer certaines vitesses ou si la distance était assez importante pour doubler ou m’insérer mais ses conseils étaient parfois de trop et j’avais l’impression qu’il me prenait pour une demeurée !
Je criais, il criait, j’avais envie de pleurer mais chialer au volant, ce n’est pas ce qu’il y a de plus judicieux ! Je lui ai pas mal râlé dessus car il ne m’a pas fait de cadeau sur certains trucs, comme me faire garer n’importe où pendant qu’il allait chercher ses cigarettes, tout en sachant très bien que je serais incapable de bouger la voiture au cas où. Il s’en foutait et me disait « tu laisses les gens se démerder, toi, tu bouges pas ».
Super facile, quand on sait qu’une de mes angoisses vient de ce que pensent les gens, des insultes et coups de klaxon dont je peux être victime. C’est très très con mais j’ai envie que les gens, en me voyant conduire, se disent « oh elle conduit bien ». Je sais que c’est à la fois totalement irrationnel et stupide mais c’est comme ça. C’est comme le fait que je regarde trop souvent dans le retro arrière pour vérifier si les gens sont suffisamment loin de moi.

Ça vient petit à petit mais j’ai encore du mal à évaluer les distances, savoir si j’ai le temps de doubler, de m’insérer ou si la voiture passe sans toucher. Ça m’a d’ailleurs coûté une sale rayure sur le bas du pare-choc avant, en sortant d’une place dans un parking souterrain, le pilier était trop proche et j’ai tout accroché. Pour la voiture, on s’en fout, elle marche très bien mais côté carrosserie, elle était déjà pleine de rayures quand on l’a acheté ; mais c’était plutôt mon égo, mon moral qui en ont pris un coup. Je me suis également tapée une grosse frayeur la semaine dernière. On était sur une voie rapide (2*2 voies) et on arrive à une voie d’insertion, il y a plusieurs véhicules qui veulent s’insérer, devant moi qui suis à droite y a une bagnole et à gauche, personne. Mais je vois, qu’une voiture arrive à très vive allure sur la voie de gauche, elle m’a rattrapé exactement à la fin de la voie d’insertion, ce qui fait qu’on s’est retrouvé à 3 sur 2 voies. Je n’ai tout simplement pas su quoi faire. J’étais bloquée à l’idée de rentrer dans la voiture devant, de me faire rentrer dedans à l’arrière ou de percuter la voiture qui arrivait à gauche en me décalant. Ma voix est un peu partie dans les aigus, j’ai pilé mais c’est exactement le genre de situations qui me stressent et où je me sens totalement impuissante, sans savoir quoi faire… 

Je n'aurais jamais cru atteindre ce niveau de conduite un jour au vu de toutes mes angoisses, je pensais que c'était complètement foutu, que j'étais irrécupérable. Au final, je suis satisfaite de tout ce que j'ai accompli mais j'aurais aimé être plus forte encore et arriver à conduire seule beaucoup plus de fois et en journée. Après je ne veux pas trop me brusquer car, c'est déjà arrivé une fois, je pensais être prête et finalement, le stress m'avait à nouveau gagné et l'incapacité à vaincre cette peur aussi. Ce n'est pas facile tous les jours, je sens que ce sera un long combat et qu'il ne faut pas que je m'arrête de pratiquer, de peur de ne plus réussir à reconduire après. 
J'espère dépasser complètement cette peur et pouvoir me dire que je suis guérie. Pouvoir prendre la voiture un matin s'il pleut, s'il caille ou si je suis en retard sans me poser de questions, sans flipper, sans transpirer et sans la boule au ventre qui remonte dans la gorge. Le chemin est encore long mais je n'ai jamais été si près du but.

 

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