Derrière moi
C'était le printemps, peut-être, sûrement. Il y avait un ciel particulièrement clair, bleu, profond, tout était si intense. Peut-être parce que ça l'était vraiment ou peut-être parce que mes yeux d'enfant donnaient une force à tout ce qui m'entourait. Je ne saurais jamais vraiment, et j'aime à penser que c'est la première raison. Elle était dans l'herbe, tout près de moi, ses jambes nues étaient déjà bronzées. Elle avait la peau si foncée quand elle était petite, si douce. Ses poils faisaient comme un duvet sous mes doigts, elle me laissait caresser ses jambes dans la douceur du soleil. À cette époque, elle me laissait faire. Elle était si petite, si belle, si elle. Elle me manque. Sa chaleur, sa bonne humeur, son sourire, un vrai sourire, une preuve d'amour.
C'était un temps de pause dans nos vies enfantines, entre les faux parfums, les tas d'herbe séchée pour des lapins imaginaires, des jeux concours avec chronomètre, et les colliers de pâquerettes. Un temps où nous étions suffisamment proches pour qu'elle me laisse caresser ses jambes. C'est une chose qui n'arrive plus. Elle a grandi. Elle ne veut plus. Elle veut s'affranchir. Je crois que jamais plus nous ne serons allongées sur l'herbe ensemble, partageant les mêmes sentiments, une tendresse. C'est un temps qui me semble terriblement loin, et révolu. Oublié. Et que mon esprit fait remonter à la surface, dans le sommeil, dans la fascination des rêves.