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Revoir un Printemps
24 janvier 2010

Temps d'Attente

Le vent s'était levé, on aurait dit que la nuit était tombée d'un coup alors que c'était encore le milieu de l'après-midi, Émilie était assise, stoïque.
Elle avait peur. Peur des mots qu'elle allait pouvoir prononcer sous la colère, sous la peine, des mots que l'angoisse aurait fait naître.
Elle avait attendu toute la nuit l'appel de Julien.

Le silence avait répondu comme un vilain écho.
Un écho sournois. La cruauté de l'attente dans l'inquiétude glaciale grandissante, Émilie avait appelé sur son portable. La sonnerie avait sonné sans fin.
En 15 heures, elle avait eu le temps de se faire tous les films du monde. Il l'avait quitté et ne souhaitait plus lui parler. Un accident était arrivé. Il avait mis fin à ses jours. On l'avait tué. Il s'était noyé. Il avait fuit.
Plus les minutes passaient et plus les suppositions étaient absurdes et dramatiques. 
C'était comme ça, elle n'arrivait pas à se contrôler.

Elle avait bien essayé de dormir, éteindre la lumière, fermer les yeux, contrôler son souffle. Sans succès. L'impatience, la terreur l'avaient tenues bien réveillée.
Le portable serré au creux des doigts, elle était restée couchée, blottie dans un lit qui sentait encore l'odeur de Julien. Elle avait respiré ce parfum des heures, et le temps passait et l'essence disparaissait, comme un présage funeste.
Entre 3 et 5 heures du matin, elle avait fini par fermer un œil. En sombrant dans un sommeil gluant et aride, elle avait enchaîné les cauchemars, du sang, des têtes coupées, des courses poursuites, des pièces closes sans porte sans fenêtre, des couloirs sans fin.

Un cri. Emilie s’était redressée brusquement. C’était délirant ce que l’angoisse d’une femme amoureuse pouvait déclencher.

Plutôt dans la soirée, elle avait pensé à prendre sa voiture et partir à sa recherche. Commencer par ses copains et ses lieux habituels, mais après ? Où chercher quelqu’un dans une ville de 250 000 habitants ?
Appeler les hôpitaux, la police avait effleuré son esprit. Mais elle s’était dit que si personne ne l’avait contacté, c’était que personne ne savait rien.

Confusion. Fracture. Espoir. Détermination. Tristesse. Interrogation. Angoisse. Attente.

Et puis à 14 heures, une sonnerie. Unique. Un numéro de fixe.
Sans hésitation, elle avait rappelé. C’est moi, je rentre, j’arrive, je suis désolé.

Quelques mots. Tout en elle était noué et l’empêchait de parler. Elle ne respirait plus, elle sentait son cœur battre très fort. Le corps gelé, elle avait reposé le téléphone, aspiré une grande goulée d’air. Doucement, elle s’était assise, elle avait peur qu’un mouvement trop brusque ne la ramène en arrière, lui montrant que ce coup de fil n’était qu’un rêve, une illusion.

C’était il y a 20 minutes, Emilie attendait mais plus pour longtemps, si tout allait bien.

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Commentaires
M
J'aime !
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M
Ce texte m'émeut.
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D
ouf un moement j'ai cru que c'était toi !!
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Z
Merci :-) <br /> Non j'ai écrit ça hier soir, d'un coup, j'avais pas l'intention de l'intégrer à autre chose mais maintenant pourquoi pas...
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P
J'aime bien ce texte. <br /> Ça fait parti de ton projet roman? Je voudrais la suiiiiiite!
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