Tu seras mon fils
Paul de Marseul, propriétaire d'un prestigieux vignoble Saint-Emilion, travaille avec son fils Martin sur le domaine familial. Très souvent agacé par son fils, déçu par ses remarques, ses idées, son travail, Paul rêve d'un successeur plus doué, plus capable de porter à bout de bras le vignoble, il rêve d'un autre fils. Tout est bousculé quand son régisseur tombe gravement malade et que le fils de celui-ci revient dans le bordelais. Paul découvre un homme talentueux, amateur de belles chaussures, qu'il aimerait avoir comme fils.
Ce film pourrait être la parfaite incarnation de la célèbre phrase "on ne choisit pas sa famille"…
Gilles Legrand nous offre avec Tu seras mon fils un très beau film, tout en retenue et où la tension est bien présente. Niels Arestrup est tout simplement magnifique tant il est méprisant, excessif, détestant son fils. Ce fils a qui il n'a jamais donné la moindre chance de s'exprimer, de faire ses preuves, ce fils qui veut tant apprendre et qui n'ose pas s'imposer, qui n'arrive pas à se démarquer de cette emprise paternelle si forte. Joué par un Lorànt Deutsch impeccable, touchant, parfois agaçant dans ses réactions trop enfantines, perpétuellement humilié par ce père qu'il admire. L'expression "tuer le père" prend tout son sens...
L'autre couple est composé de Patrick Chesnais, parfait, et Nicolas Bridet, que j'ai découvert pour la première fois, qui incarne avec brio ce jeune homme certes doué mais très ambitieux, très sûr de lui et cela change tout. Sans oublier Valérie Mairesse et Anne Marivin, mère et épouse impuissantes.
Tous ces personnages évoluent dans le paysage viticole bordelais, superbement filmé par Legrand, les couleurs du début de l'automne se mélangent au rouge puissant du raisin, la vigne comme spectateur passif du drame qui se joue. Les dialogues sont savoureux, co-écrits avec Delphine de Vigan - auteur de Rien ne s'oppose à la nuit. Un long métrage intense qui se déguste comme un bon vin, réussit principalement grâce à l'interprétation de ces personnages, émouvants, où la maltraitance prend ici une autre tournure, où la construction du fils est détruite par ce père odieux.